Le 19 février a été diffusé publiquement le rapport d’Aurélien Taché, « 72 propositions pour une politique ambitieuse d’intégration des étrangers arrivant en France« .
Les propositions contenues dans ce rapport vont toutes dans le bon sens, et nous ne pouvons que nous féliciter de cette démarche.
Facilité d’accès à l’emploi, au logement, renforcement des cours de français, nous apportons notre soutien à toutes ces propositions, qui vont dans le sens d’une amélioration de l’accès aux droits des personnes étrangères, ce qui permettrait de réduire les inégalités que nous dénonçons depuis toujours.
Comme le rappelle ce rapport, le taux de pauvreté des immigrés est presque 3 fois plus élevé que le taux de pauvreté national et le taux de chômage des étrangers hors UE est 2 fois et demi supérieur au taux de chômage des Français.
Les périodes d’attente de l’instruction des demandes d’asile occasionnent des périodes d’inactivités préjudiciables aux exilés, et les barrières sont nombreuses pour ceux qui accèdent à une protection.
Nous espérons donc que le gouvernement saura donner des suites concrètes aux propositions de ce rapport.
Mais nous craignons que ce rapport ne soit qu’une caution de façade, dans l’espoir de contrebalancer le projet de loi asile et immigration présenté 2 jours plus tard, et qui porte atteinte au respect du droit d’asile. Nous le constatons déjà quotidiennement, via notre permanence d’accueil, et les multiples sollicitations qui nous sont faites : les droits fondamentaux et juridiques ne sont déjà que rarement respectés.
Ce projet comporte un grand nombre de mesures particulièrement inquiétantes, qui constituent un recul dans l’accès aux droits fondamentaux des étrangers et va dégrader la procédure d’asile et l’accompagnement social proposé et déjà insuffisant.
Les situations actuelles inacceptables sont déjà innombrables :
– Non-renouvellement de titre de séjour qui intervient brutalement, pour des personnes qui parfois sont en France depuis des années, qui travaillent et qui sont parfaitement intégrées…
– Fin de prise en charge brutale pour des personnes en situation de vulnérabilité…
– Application systématique et arbitraire du règlement Dublin, sans aucune prise en compte des situations humanitaires des personnes, alors que ce même règlement permet d’étudier le dépôt d’une demande d’asile…
Quasi quotidiennement des personnes nous signalent des atteintes à leurs droits, et la proposition de loi telle qu’elle est présentée risque d’aggraver encore plus la situation des étrangers en demande de protection :
- Le raccourcissement des délais d’instruction et de recours ne pourra se faire qu’au détriment des demandeurs et risque d’exclure des milliers de personnes de la protection.
- Le renforcement des mesures directives de contrôle par les préfectures risque de créer une confusion générale entre surveillance administrative et action sociale.
- Le développement à outrance des mesures de contrôle et de privation de liberté ne va qu’accroitre les restrictions de l’accès aux droits.
Comme le rappelle M. Toubon, défenseur des droits, les demandeurs d’asile vont être encore plus maltraités par ce projet de loi.
Nous ne sommes qu’au début des phénomènes migratoires, nous sommes face à un défi humanitaire à relever, et ce n’est qu’en ayant une politique volontaire et audacieuse que nous le relèveront. Cela ne se fera qu’au prix d’une concertation active entre les instances administratives et la société civile.
Les énergies citoyennes sont très nombreuses, nous le constatons chaque jour, et ne demandent qu’à agir, mais ont besoin du soutien des élus, des administrations, des collectivités territoriales.
En refusant d’avancer sur la question de l’accès à un titre de séjour pour les dizaines de milliers de personnes qui vivent déjà sur le sol français, parfois depuis des années, et sur la modification nécessaire du règlement Dublin, ce projet passe à côté d’une occasion de s’attaquer réellement à la pauvreté et à la souffrance sociale.
- Nous en appelons à la responsabilité des parlementaires pour modifier en profondeur ce projet de loi, afin que soit définie une politique publique qui tienne compte des propositions faites par les acteurs associatifs de terrain.
- Nous lançons une lettre ouverte aux elu.e.s finistériens.es afin d’attirer leur attention sur la situation alarmante des migrants et des mineurs non accompagnés (MNA) en Finistère.
- Pour un accueil efficace et respectueux des droits des personnes en exil, nous relançons la demande de mise en place de réunions de concertation entre les différents acteurs : associations gestionnaires, DDCS, OFII, préfecture ET associations.